Togo : Mauvaises conditions de détention dans les prisons, l’OMCT et le SPT toujours préoccupés

Société Civile Médias
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(Société Civile Médias) – Au Togo, les mauvaises conditions de détention dans les prisons demeurent une préoccupation pour l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT). En mission de haut niveau dans le pays depuis le lundi 5 décembre sur invitation du Collectif des Associations Contre l’Impunité au Togo (CACIT), des représentants de l’OMCT et du Sous-comité pour la prévention de la torture (SPT) tirent la sonnette d’alarme et attirent, une fois de plus, l’attention du gouvernement togolais sur la nécessite d’améliorer la situation, surtout à la prison civile de Lomé, le plus important établissement pénitentiaire du pays.

Visite de la mission au Ministère de la santé

Pour Isidore Ngueuleu, Conseiller aux droits humains pour la région Afrique de l’OMCT, les conditions de détention dans cette prison de la capitale togolaise sont encore très loin des standards internationaux et n’ont pas connu de changements substantiels durant ces dernières années

« Notre visite à la prison civile de Lomé nous a permis de nous rendre compte que les êtres humains qui y vivent sont privés non seulement de leur liberté, mais aussi et surtout de leur dignité, ce qui n’est pas normal », déplore-t-il après que la mission se soit rendue dans cet établissement le mardi 6 décembre.

« L’OMCT est engagée dans un plaidoyer auprès des autorités togolaises pour que les conditions de vie dans les lieux de privation de liberté puissent être respectueuses de la dignité humaine. Ce plaidoyer dure depuis quelques années et nous avons observé quelques frémissements, mais nous sommes encore impatients de voir des actions concrètes », ajoute M. Ngueuleu.

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Isidore Ngueuleu, Conseiller aux droits humains pour la région Afrique de l’OMCT

Alors qu’elle a une capacité d’accueil de 666 personnes, la prison civile de Lomé comptait au 20 juillet 2020 près de 1.208 détenus, dont 378 condamnés, 268 prévenus et 562 inculpés, à en croire un rapport rendu public en décembre 2020 par le Collectif des Associations Contre l’Impunité au Togo (CACIT) et l’OMCT. Une surpopulation carcérale que déplore Isidore Ngueuleu, en plus des autres manquements que connait ce centre de détention notamment en ce qui concerne l’alimentation et la santé des détenus.

« Les prisons togolaises n’ont pas de médecins, elles n’ont pas d’infirmiers. Ce sont des assistants volontaires qui y sont. Ce qui signifie qu’on peut y mourir juste pour un mal bénin », fait savoir le représentant de l’OMCT, avant d’insister sur le fait « lorsqu’on est incarcéré, il n’y a que la liberté d’aller et de venir dont on est privé. On n’est pas privé des autres droits parce qu’ils ne sont pas le fruit d’une sanction pénale ».

Rappelant que les difficiles conditions de détention à la prison de Lomé ont conduit le Comité contre la torture (CAT) à demander, la fermeture « définitive » et « sans délai » de cet établissement en 2019, Isidore Ngueuleu en appelle au gouvernement togolais pour l’amélioration des conditions de détention aussi bien à la prison civile de Lomé que dans les autres prisons du Togo.

Visite de la mission à la Direction de l’Administration pénitentiaire et de la Réinsertion

« Notre présence ici vise à interpeller les autorités togolaises et à leur demander d’aller au-delà des engagements en commençant vraiment à faire ce qu’il faut pour l’amélioration des conditions de détention aussi bien à la prison de Lomé que dans les autres prisons à l’intérieur du pays. Les réalités que nous présentons n’ont rien d’une animosité parce que si nous avons pu nous rendre dans les lieux de détention, c’est parce que nous y avons été autorisés. L’administration pénitentiaires et les ministères en charge de la question sont ouverts à nos observations. », se réjouit le représentant de l’OMCT Genève.

A noter qu’outre la prison civile de Lomé, la mission a également visité celle de Tsévié, ainsi que le Centre d’Accès au droit et à la Justice pour mineurs. Mercredi, elle a animé, par l’intermédiaire d’Isidore Ngueuleu, une communication à l’atelier de renforcement des capacités des acteurs de la chaine pénale sur la prévention de la torture. Occasion pour le représentant de l’OMCT d’échanger avec les Officiers de police judiciaires et magistrats sur l’importance d’avoir une appréciation de la juste réalité des choses au moment d’envoyer quelqu’un en prison.

« Les prisons n’étant pas des endroits propices à la vie humaine, ces acteurs devraient bien peser leurs décisions avant d’y envoyer des gens. Il est aussi important que ceux d’entre eux qui ne connaissent pas ces lieux fassent l’effort de s’y rendre pour avoir une idée de ce qui s’y passe en termes de mauvais traitement et de conditions de vie. Il n’y a que comme cela qu’ils peuvent bien analyser les cas avant de prendre la décision d’envoyer ou de ne pas envoyer quelqu’un en prison, vu qu’aujourd’hui on peut se retrouver là-bas pour des choses qui n’en valent même pas la peine », estime le Conseiller aux droits humains pour la région Afrique de l’OMCT.

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M. Ngueuleu, au cours de son échange avec les acteurs de la chaîne pénale

Par ailleurs, la mission se fixe également pour objectif de rendre disponible un document devant soutenir le plaidoyer au niveau national et international pour le renforcement de la prévention de la torture au Togo ; et de susciter le renforcement de la mise en œuvre des recommandations du SPT et du CAT en vue d’un Mécanisme national de prévention plus efficace auprès des acteurs pertinents. Elle entend aussi favoriser une plus forte implication des médias et des communautés pour la prévention de la torture au Togo et renforcer les capacités des membres de l’« Observatoire pour la prévention et la lutte contre la torture au Togo », sur les techniques efficaces pour accompagner le gouvernement pour la prévention de la torture.

Il faut rappeler qu’avant cette mission, deux précédentes avaient été effectuées au Togo en avril 2019 et septembre 2021.