Droits Humains : Que retenir du passage du Togo devant le Comité des Droits de l’enfant des Nations Unies ?

Société Civile Médias
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(Société Civile Médias) – Le Comité des droits de l’enfant des Nations Unies a examiné, en fin de semaine dernière, le rapport périodique soumis par le Togo au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant et du protocole facultatif relatif à l’implication des enfants dans les conflits armés. Un rapport présenté par Adjovi Lolonyo Apedo-Anakoma, Ministre de l’action sociale, de la promotion de la femme et de l’alphabétisation et qui a fait l’objet des questions et observations des membres du Comité. Retour sur les grandes lignes de la présentation du Togo et les préoccupations du Comité des droits de l’enfant.

Les préoccupations du Comité des droits de l’enfant

Il faut d’entrer noter que pendant cet examen, des experts membres du Comité se sont félicités des progrès réalisés par le Togo en termes de législation pour protéger les droits de l’enfant, et plus particulièrement les enfants en situation vulnérable ou en contact avec la loi. Les experts ont aussi noté avec satisfaction les efforts du Gouvernement pour harmoniser les politiques en place en matière de protection de l’enfance.

Une réunion du Comité des droits de l’enfant de l’ONU

Toutefois, des préoccupations ont été exprimées au sujet du mariage précoce, en particulier s’agissant des dispenses accordées par le juge autorisant le mariage d’enfants dès l’âge de 16 ans. En 2017, au Togo, 25% des jeunes filles étaient mariées avant l’âge de 18 ans, a-t-il été relevé : chaque dispense doit donc être « l’exception de l’exception de l’exception », a insisté une experte à ce propos. Constatant d’autre part que le Code de l’enfant était en révision depuis trois ans, une experte a souhaité savoir quelles étaient les raisons de ce blocage.

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L’attention des membres du Comité a également porté sur la situation relative au travail des enfants au Togo, notamment le travail domestique, « assimilable à de l’esclavage », a dit une experte. La situation des enfants des rues a elle aussi été jugée préoccupante.

D’autres interrogations ou préoccupations ont été exprimées concernant des difficultés en matière d’enregistrement des naissances, malgré les mesures prises par le Gouvernement pour y remédier ; la persistance de violences envers les enfants ; ou encore des discriminations à l’égard des enfants dits sorciers, des jeunes filles, des enfants handicapés et des enfants LBGT. De plus, a-t-il été relevé, l’absence de données à jour, ventilées par âge, sexe et type de handicap, ne permet pas d’élaborer des politiques et des législations adéquates.

Plusieurs questions des experts ont porté sur l’application par le Togo du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

Les grandes lignes du rapport du Togo

Dans la présentation du rapport du Togo, la cheffe de la délégation, la ministre Apedo-Anakoma, a indiqué que son pays avait accueilli avec la plus grande attention les observations finales formulées par le Comité lors du précédent examen. Ces recommandations ont conduit à de nombreuses évolutions législatives, institutionnelles et réglementaires. La ministre en charge de l’Action sociale du Togo a ajouté que, dans son pays, la société civile était systématiquement impliquée dans toutes les questions relatives à la protection de l’enfant et qu’elle était représentée au sein du Comité national des droits de l’enfant (CNE) et du cadre de concertation nationale des acteurs de protection des enfants.

S’agissant de l’enregistrement universel des naissances, Mme Apedo-Anakoma a précisé que le Togo comptait 1139 centres d’état civil principalement installés dans les cantons et les villages, ainsi que des centres de santé afin de rapprocher les services d’état civil des usagers. Le taux d’enregistrement des naissances est aujourd’hui de 87%. Ces mesures, auxquelles s’ajoute la révision en cours du code de nationalité togolais, vont contribuer à lutter contre l’apatridie, a précisé Mme Apedo-Anakoma.

La délégation togolaise présente à Genève avec des membres du Comité

Par ailleurs, la politique nationale de santé de 2012 et ses plans de développement sanitaires ont permis la réduction de la mortalité néonatale, infantile et juvénile. Parmi les mesures prises, Mme Apedo-Anakoma a cité le programme élargi de vaccination offrant des vaccins gratuits aux enfants, la subvention de la césarienne depuis 2012 ou encore la prise en charge gratuite du paludisme grave au profit des enfants de moins de cinq ans.

Le Togo a aussi intensifié ses investissements dans le secteur de l’éducation, qui représente aujourd’hui près de 25% du budget total de l’État. De même, d’importantes actions ont été menées pour assurer la qualité des enseignements. Ces actions ont permis d’accroître le taux brut de scolarisation au primaire, qui est passé de 122,4% en 2018 à 132,5% en 2022, avec un taux d’achèvement de 88,7%.

Mme Apedo-Anakoma a par ailleurs indiqué que le cadre normatif des droits de l’enfant en milieu scolaire avait également été renforcé. Outre les dispositions contenues dans le Code de l’enfant, une note circulaire interdit toutes les formes de punitions corporelles et châtiments dégradants en milieu scolaire. Le Togo a également multiplié ses efforts pour lutter contre les violences faites aux enfants, en renforçant son arsenal juridique avec l’adoption du nouveau Code pénal et le Code des personnes et de la famille, modifié en 2014.

Au Togo, aucun réfugié ou demandeur d’asile ne peut faire l’objet d’un refoulement, a précisé Mme Apedo-Anakoma. Ainsi, tous les enfants demandeurs d’asile originaires du Burkina-Faso sont enregistrés comme tels dans la base de données de la Coordination nationale d’assistance aux réfugiés (CNAR) et bénéficient du statut de réfugié.

S’agissant de la justice pour mineurs, la brigade pour mineurs de Lomé a été transformée en « Centre d’accès au droit et à la justice pour mineurs ». De plus, des juges pour enfants ont été nommés dans les cinq tribunaux de grande instance, les neuf tribunaux d’instance à compétence correctionnelle et civile, outre la nomination de juges de tutelle dans les seize tribunaux d’instance à compétence civile.

S’agissant de l’application du Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, l’âge minimum pour l’enrôlement dans les forces de défense et de sécurité est de 18 ans. Toutefois, deux écoles militaires sont autorisées à recevoir des enfants de moins de 18 ans, a précisé la Ministre.

Si le Togo n’a pas connu de conflits armés, a souligné Mme Apedo-Anakoma, des préoccupations demeurent concernant la situation qui prévaut dans cette partie septentrionale du pays, frontalière du Burkina Faso, où les forces de défense et de sécurité font face, depuis 2021, aux attaques terroristes. Des groupes armés basés sur le territoire Burkinabé font des incursions sur le territoire togolais et s’attaquent aux populations civiles.

Pour note, le Comité a adopté à huis clos ses observations finales sur le rapport du Togo et les publiera à l’issue de sa session, ce vendredi 22 septembre. Nous y reviendrons.

(Avec le service de l’information d’ONU Genève)