Lutte contre la traite des personnes au Togo / Wilfried Agbo (Expertise France) : « Notre action a contribué à mobiliser les acteurs »

Société Civile Médias
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(Société Civile Médias) – Au Togo, Expertise France a fait de la lutte contre la traite des personnes son cheval de bataille. En plus d’avoir joué un rôle majeur dans la mise en place de la Commission nationale de lutte contre la traite des personnes (CNLTP), l’Agence s’est distinguée par l’organisation d’une série de formations qui a permis de renforcer les capacités de tous les acteurs intervenant dans la lutte. Dans cette interview, Kodjovi Wilfried Agbo, chargé de projet Togo/Bénin à Expertise France, revient sur l’essentiel des actions qui ont permis de réorganiser et de booster la lutte pour la rendre plus efficace. A noter que ces actions ont été menées dans le cadre du projet « Appui à la lutte contre la traite des personnes dans les pays du Golfe de Guinée » (ALTP).

Agence Société Civile Médias : Monsieur Wilfried Agbo, comment se présente la traite des personnes au Togo ?

La traite des personnes est multiforme. Elle touche aussi bien les femmes que les hommes, les enfants et toutes les régions du Togo. Bien sûr qu’il y a des zones beaucoup plus pourvoyeuses que d’autres, mais de manière générale, toutes les régions, toutes les préfectures, toutes les localités sont concernées par le phénomène.

Formation des OPJ en avril 2022

En termes de lutte, qu’est-ce qui est fait sur le terrain et quelles sont les actions qui sont menées pour renforcer ce qui est déjà fait ?

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Sur le terrain, il y a beaucoup d’actions qui ont été menées. Expertise France n’est pas le seul acteur sur le terrain car bien avant qu’il ne démarre ses activités, il y a le Ministère en charge de ce problème, qui a le rôle régalien de lutte contre la traite et qui mène une lutte sans merci contre le phénomène. Il y a également des mécanismes qui sont mis en place comme la Commission nationale de réinsertion des enfants victimes de traite, la Commission nationale de lutte contre la traite des personnes au Togo (CNLTP) avec ses démembrements préfectoraux. Les organisations de la société civile ne sont pas du reste, elles développent des actions de prévention et de prise en charge.

Les acteurs de la chaîne pénale jouent également un rôle majeur dans la lutte contre le phénomène, surtout en ce qui concerne la répression. Au niveau régional, il y a des décisions qui ont été prises, des accords qui ont été signés par le Togo et bien d’autres. On est toujours dans la logique de ces interventions.

Formation de 20 journalistes du Togo et du Bénin en février 2023

Il y avait des acteurs qui luttaient contre la traite des personnes avant qu’Expertise France ne se lance dans le combat. Quelle a été la touche particulière d’Expertise France dans la lutte ?

L’une des particularités d’Expertise France, c’est que nous sommes beaucoup plus dans le faire faire. L’autre touche particulière, c’est notre contribution à la mise en place de la CNLTP. Notre action a contribué à mobiliser les acteurs pour que ce mécanisme de coordination puisse exister. Avant, la lutte se menait de façon éparse, chacun de son côté, il y avait même des doublons sur le terrain, ce qui ne permettait pas une utilisation efficiente des ressources que les bailleurs mettent à la disposition des différents acteurs.

Au-delà de cela, nous avons contribué, au niveau des acteurs de la chaîne pénale, à mettre à disposition de l’école de police, de la gendarmerie, de la magistrature, un manuel de formation pour que tout ceux qui passent par ces écoles aient déjà des connaissances de base, quitte à être renforcés par des formations continues sur le terrain. Et aussi au niveau de la coopération, il est vrai que des accords régionaux ont été signés, mais nous avons aussi contribué à voir quels sont les défis qui sont liés à ces accords, pourquoi ces accords n’ont pas été appliqués jusqu’à aujourd’hui. Et cela nous a permis de réveiller un peu les différents acteurs pour qu’ils se mettent davantage à l’œuvre afin que le combat soit mené de manière plus efficace.

Expertise France a équipe la CNLTP en août 2023

Par rapport à tout ce qui a été mis en place au Togo et dans la sous-région, y a-t-il espoir que le phénomène soit définitivement endigué un jour ?

Oui, il y a de l’espoir. Tant que nous nous battons, tant que des acteurs se mobilisent, tant qu’on prend des décisions au sommet de l’État, nous avons espoir que cela change. Sinon, nous n’aurons pas besoin d’investir des ressources pour pouvoir mobiliser des acteurs afin que la lutte soit beaucoup plus efficace. C’est dans ce contexte que nous organisons des formations pour que les différents acteurs de terrain puissent s’approprier le système de référencement. Quand on identifie un cas, qu’est-ce qu’on fait jusqu’à la réhabilitation de ce cas, et quel acteur intervient à quel niveau ? Je crois qu’en réunissant tous ces acteurs avec la coordination de la Commission nationale de lutte, on aura gain de cause.