Togo – Harcèlement sexuel : Alafia Jeunes associe les leaders communautaires à la lutte pour la déconstruction des normes qui encouragent le phénomène

Société Civile Médias
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(Société Civile Médias) – Organisation de jeune partenaire de Plan International Togo sur le projet « Autonomisation des filles et jeunes femmes pour l’engagement citoyen au Togo : Girls Lead », Alafia-Jeunes veut faire des leaders communautaires ses alliés dans la lutte contre le harcèlement sexuel. Dans le cadre de ses activités de plaidoyer et d’influence, elle a échangé avec ceux des communes Golfe 5, Golfe 7 et Agoè-Nyivé 5 le vendredi 23 septembre. A travers cette rencontre, il s’agissait pour Alafia Jeunes de présenter à ces leaders le document d’influence élaboré avec d’autres organisation de jeunes en vue de les amener à prendre des engagements pour contribuer aux changements de comportement et d’attitude de leur population sur le harcèlement sexuel à travers la déconstruction de certaines normes qui encouragent le phénomène.

Un des grands résultats attendus du projet ‘‘Girls Lead’’, l’action d’influence est menée à l’endroit des autorités, des médias et des leaders communautaires. Il s’agit de travailler avec eux pour pouvoir déceler les violences les plus récurrentes dans les zones de mise en œuvre du projet et leurs causes et de proposer des actions pour lutter contre celles-ci.

Vue partielle des participants à la rencontre

La rencontre avec les leaders communautaires des trois communes, notamment les chefs cantons, les leaders religieux, les groupements de femmes, les clubs de jeunes, a donc été pour Alafia Jeunes l’occasion de présenter les grandes lignes du document d’influence à ces derniers.

« Dans le cadre de la mise en œuvre des activités de plaidoyer et d’influence sur le projet Girls Lead, nous avons travaillé à l’élaboration de ce document destiné à ces leaders. Il fallait donc les rassembler pour échanger avec eux sur le bien-fondé de ce document d’influence et leur présenter son contenu afin de les amener à épouser la cause que nous défendons », explique Justine Attigbla, présidente d’Alafia Jeunes.

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Une phase des discussions entre les leaders et les jeunes sur les normes

Les échanges ont notamment porté sur les normes et croyances qui encouragent le harcèlement sexuel et contribuent à maintenir ce phénomène dans les communautés en dépit des efforts déployés pour l’éradiquer. Cinq de ses normes ont été identifiées par les jeunes dans le document d’influence et ont fait l’objet d’intéressantes discussions. Il s’agit de : « la fille ne doit jamais accepter les premières avances des garçons, pour ne pas être considérée comme une fille facile ou une pute » ; «  un garçon doit toujours insister dans ses avances tant bien même que la fille ne cesse de refuser pour ne pas être considéré comme un lâche, un incapable ou un faible » ; « un vrai homme doit coucher avec plusieurs filles » ; « si une fille est victime de violence sexuelle c’est qu’elle-même l’a cherché » ; « une fille ne doit pas faire la cour à un garçon c’est pourquoi les garçons doivent insister » ; « la fille / femme doit se soumettre totalement à la volonté du garçon / homme, considéré comme supérieur ».

Mélanie Gnandi, Directrice du projet ‘Girls Lead’ (à droite), lors de l’une de ses interventions

Adhésion des leaders communautaires pour la déconstruction de ces normes

Des discussions et échanges avec les leaders communautaires, on retiendra qu’ils sont déjà informés et sont au courant de l’existence de cas de harcèlement sexuel dans leurs milieux.

« C’est avec joie que nous avons accueilli cette initiative d’Alafia Jeunes parce que le harcèlement sexuel est une réalité dans nos communautés », indique Togbui Dogbé Alley VII, Chef du village Sagbado Avoémé. « Il m’est arrivé à plusieurs reprises de recevoir de ces cas et j’avoue que parfois, nous ne savons comment les régler et sommes obligés de les confier à la justice, aux centres d’écoute ou à d’autres structures concernées par la question », ajoute-t-il.

Fred Da Silveira, chargé à la communication du projet ‘Girls Lead’ lors de son intervention

Pour ce garant des us et coutumes, il faut sérieusement faire face à ce problème et lui trouver des solutions durables. Le Chef de Sagbado Avoémé prévoit donc aborder le sujet et en discuter avec les membres des CVD (Comités villageois de développement) et les prêtres traditionnels de son milieu. Et d’ajouter que la déconstruction des normes et croyances qui encouragent le harcèlement sexuel aura une bonne place dans ces discussions

Idem du côté du prophète Thomas Duho de l’Eglise Kindom of God Chapel de Ségbé. D’après ce dernier, nombreuses sont les filles qui ont vu leur cursus scolaire interrompu à cause du harcèlement sexuel. D’où l’importance d’en faire un large écho.

Prophète Thomas Duho

« En tant que leader dans nos églises, nous sommes très écoutés. Et pour que ce phénomène qui détruit la vie de nos filles cesse d’exister, nous avons aussi notre contribution à apporter en en parlant autour de nous et surtout en détruisant les idées reçues. Justifier le harcèlement sexuel par exemple par l’habillement d’une fille est un faux problème. Les garçons doivent apprendre à se contrôler et à se maîtriser et nous nous évertuerons à leur en parler », promet l’homme de Dieu.

Satisfaite de la rencontre et surtout de l’adhésion des leaders, la Directrice du projet ‘‘Girls Lead’’, Mélanie Gnandi, se dit consciente du fait que la déconstruction des normes ne pourra pas se faire d’un coup.

Remise du document d’influence à un des leaders

« Ce sont des normes qui sont véhiculées depuis bien longtemps et on ne peut pas les déconstruire du jour au lendemain. Proposer des pratiques qui vont à l’encontre de ce qui se fait il y a des années n’est pas chose aisée. Il nous faut beaucoup de temps, de patience et d’activités en continue pour atteindre notre objectif », fit-elle observer, avant d’ajouter que le travail de sensibilisation va se poursuivre et avec l’appui d’Alafia Jeunes qui va se rendre disponible pour appuyer les leaders dans la lutte pour la déconstruction des normes.

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Photo de famille

Créée en mai 2006, Alafia Jeunes est une association de jeunes au service des jeunes pour leur épanouissement et leur développement. Elle s’est donnée pour mission l’émancipation de la jeunesse togolaise. Il s’agit de rendre la jeunesse Togolaise responsable et acteur primordial pour le développement durable du pays en passant par la promotion de la jeune fille. 

Le projet ‘’Girls Lead’’ est mis en œuvre par Plan International Togo depuis 2018 pour une durée de cinq ans. Il a pour objectif général de permettre aux organisations, réseaux des filles et des jeunes femmes, d’utiliser leur voix et ressources pour entreprendre des actions collectives visant à contribuer à la transformation des relations inéquitables de pouvoir.